Égalité et justice dans la famille marocaine, thème d’un colloque national à Rabat

L’égalité et la justice au sein de la famille marocaine est le thème d’un colloque national, dont les travaux ont débuté jeudi à Rabat, à l’initiative du ministère de la Justice en partenariat avec ONU-Femmes dans le cadre de la célébration de la Journée nationale de la femme marocaine.

S’exprimant lors de la séance d’ouverture de ce conclave de deux jours en présentiel et à distance, le ministre de la Justice, Abdellatif Ouahbi, a indiqué que la mise en oeuvre du Code de la famille, 18 ans après son adoption, a démontré l’impératif d’ouvrir un débat public en vue de la révision de ses dispositions et le traitement des dysfonctionnements et défis imposés par la pratique.

Il est temps, a-t-il soutenu, de réviser les dispositions du Code de la famille, dans le sillage de son adaptation aux changements et réformes que le Maroc a connu depuis l’adoption de la Constitution de 2011 et les conventions internationales ratifiées par le Royaume, avec pour objectif de renforcer le rôle de la médiation familiale dans le règlement des conflits familiaux.

M. Ouahbi a fait part aussi de l’urgence de réfléchir à la possibilité de mise en place d’un système intégré de justice familiale, compatible avec les besoins sociaux et culturels de la société, tout en répondant aux contraintes qui pourraient faire obstacle à l’application optimale de ce texte de loi, notant que cet objectif ne peut être atteint que dans le cadre d’une approche participative englobant l’ensemble des acteurs concernés.

Pour sa part, le président délégué du Conseil supérieur du pouvoir judiciaire (CSPJ), Mohamed Abdennabaoui, a souligné que deux décennies après la mise en application du Code de la famille, et compte tenu du dynamisme croissant des droits de l’Homme dans le sillage d’une société en perpétuelle mutation en termes de renforcement de la place de la femme et des droits de l’enfant, il est nécessaire d’évaluer l’efficacité des dispositions du Code de la famille à protéger la famille, d’une part, et son adaptation aux principes de l’égalité et de l’équité, contenus dans la Constitution, de l’autre.

Il a estimé que la révision du Code de la famille constitue un élément essentiel dans la consolidation de la famille marocaine, faisant observer que cette révision doit se focaliser sur les lacunes juridiques, et les dysfonctionnement des textes, tout en modifiant les lectures juridiques et judiciaires incompatibles avec les besoins de la société et le texte de la Constitution.

Et d’ajouter que cette révision doit prendre en considération la jurisprudence et l’action judiciaire adéquates avec la stabilité de la famille pour parvenir à trouver des solutions aux affaires conflictuelles, dans le cadre de l’attachement aux principes de la Charia et la Constitution, en vue de réaliser la justice et l’équité et protéger toutes les composantes de la famille.

Même son de cloche chez le Procureur général du Roi près la Cour de cassation, Président du ministère public, El Hassan Daki, qui a insisté sur l’importance d’harmoniser les dispositions du Code de la famille avec la Constitution et les conventions internationales, soulignant que le Maroc est capable d’améliorer ce code avec sérénité, responsabilité et engagement en faveur des constantes fondamentales qui font de la famille le pilier de l’édification d’une société équilibrée, susceptible de relever les défis du développement.

Pour lui, cette rencontre est une occasion de lancer une réflexion collective, libre et responsable, d’échanger les idées et de tirer profit des expertises et expériences comparées dans ce domaine, en vue de contribuer, comme force de proposition, au processus de développement du Code de la famille. De son côté, le président du Conseil économique, social et environnemental (CESE), Ahmed Rida Chami, a estimé que les réalisations accomplies demeurent insuffisantes, faisant allusion à plusieurs formes de discrimination qui entravent l’accès de la femme à ses droits politiques, économiques et sociaux.

Le Conseil considère que le Code de la famille, en sa qualité de texte de loi et de pratiques juridiques et judiciaires, occupe une place de choix parmi les chantiers de réformes à entreprendre pour répondre aux aspirations de la société, et ce conformément aux dispositions de la Constitution et aux engagements internationaux du Maroc, a-t-il relevé, notant que le CESE a constaté plusieurs formes de discrimination en rapport avec le Code de la famille, dont la tutelle sur les enfants, le mariage des mineurs et la gestion de l’argent acquis par les deux conjoints pendant le mariage.

Pour sa part, la représentante d’ONU-Femmes, Leila Rhiwi, a relevé que le Royaume s’est engagé, depuis plus de 20 ans, pour aller de l’avant dans le processus de la mise en oeuvre de l’agenda de l’égalité homme/femme et la lutte contre la discrimination contre les femmes et les filles, ajoutant que cet engagement s’est concrétisé à travers un ensemble de réformes constitutionnelle, législative et politique.

La responsable onusienne a cité à titre d’illustration de cet engagement, le dépôt de la demande d’adhésion au Protocole facultatif à la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes, tout en considérant que la révision des textes de loi n’est qu’un volet parmi d’autres pour régler une problématique cruciale qui requiert la conjugaison des efforts de tous les acteurs concernés sur les plans juridique, économique et social.

Le programme de ce colloque, qui connait la participation de nombreux acteurs nationaux issus de différents départements gouvernementaux, institutions constitutionnelles, associations de la société civile et d’universités, permet aux différentes parties prenantes de contribuer aux ateliers thématiques et de présenter des études comparées sur le sujet.

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