L’action associative entre l’essoufflement et l’absence de financement
Chaque fois qu’une affaire à caractère social, politique ou même économique occupe le devant de la scène en agitant les débats publics dans les réseaux sociaux et les médias, se pose la question de l’encadrement de ces discussions et partant du rôle des entités assumant cette mission, en particulier les associations de la société civile qui restent les plus qualifiées pour bien s’acquitter de ce rôle.
L’action associative, au regard de son rôle de pilier fondamental de la société, est le garant d’une éthique d’encadrement en vue de contribuer à la formation d’une jeunesse imprégnée de valeurs de citoyenneté et animée d’un esprit de responsabilité, outre son apport aux efforts de développement et de progrès sociétal.
La réalisation de ces objectifs reste toutefois tributaire de l’aptitude de l’acteur associatif à interagir avec les contraintes de l’action associative en termes d’encadrement et de ressources financières et humaines, en plus de l’élargissement des catégories ciblées et la capacité d’interagir avec les préoccupations et besoins dictés par la réalité marocaine ainsi que l’évaluation constante des activités et projets dans lesquels il est engagé afin d’améliorer son rendement et d’atteindre les objectifs fixés.
Ayoub El Tassi, membre de l’Association marocaine pour l’éducation de la jeunesse, section Tit Mellil, a indiqué dans une déclaration à la MAP, qu’au vu de son importance, le travail associatif est confronté à une série de contraintes qui entravent sa continuité, son renouveau et son accompagnement des mutations en cours.
Parmi ces entraves, il a notamment cité le manque de formation des acteurs opérant dans ce domaine, la similitude et le chevauchement d’activités, l’utilisation des efforts associatifs à des fins personnelles ou politiques, ainsi que le manque d’intérêt à l’égard de cette question en particulier dans cette région, et l’absence de concertations autour de la gestion de ce domaine.
En dépit de la diversité des champs d’actions de l’association, a-t-il dit, les principales questions au cœur des préoccupations sont celles ayant trait à l’enfance, la jeunesse, l’environnement et le développement, le but recherché étant d’assurer la formation de ces catégories qui représentent l’avenir du Maroc.
Pour sa part, Thami Habchi, un observateur du domaine de l’action associative dans la province de Berrechid, a estimé que le paysage associatif pâtit d’une baisse de l’activité culturelle, contrairement au volet sportif, lequel a connu une reprise notable au cours des 20 dernières années à la faveur de la multiplication du nombre d’associations et de clubs sportifs, suite au renforcement des infrastructures sportives et des stades des proximité dans la région, outre le soutien financier apporté à l’équipe sportive locale.
Selon M. Habchi, la vie associative dans la région a été marquée au cours des dernières décennies par l’émergence d’associations à vocation sociale, au détriment de celles actives dans le domaine culturel, qui pâtissent d’un manque d’infrastructures et de subventions.
Les contraintes auxquelles font face les associations locales se sont également reflétées dans la faible qualification et la formation en matière de gestion administrative et financière, ce qui constitue une entrave au niveau de la gouvernance en matière de gestion qui leur permettrait l’élaboration et la mise en œuvre des programmes et des projets de développement associatifs et participatifs, a-t-il dit.
Jamal El Kafi, membre de l’Association Marocaine de Développement Social (AMADS), a fait savoir de son côté que l’association avait mené une étude sur le travail associatif et les associations, laquelle a mis en évidence le potentiel de ces entités.
M. El Kafi, également enseignant à la Faculté des sciences d’El Jadida, a précisé que l’enquête a porté sur 350 associations à travers le Royaume, actives dans divers domaines notamment l’éducation, le sport, la santé, la culture, l’alphabétisation, les droits de l’Homme, la protection de l’enfance et l’environnement.
Cette étude a ciblé trois axes liés aux ressources humaines, aux finances et à la formation au sein des associations, a-t-il dit, ajoutant qu’un grand nombre de personnes interrogées ont exprimé leur besoin urgent en matière de formation.
Il a fait observer que la plupart des associations disposent de budgets de moins de 100 000 dirhams par an consacrés à la gestion des affaires et des activités de l’association tout au long de l’année, relevant le manque de personnel opérant régulièrement outre le recours aux personnes pratiquant un bénévolat irrégulier.
Il a de même noté que cette étude est de nature à permettre à l’Association et à ses partenaires de définir ses domaines d’action pour améliorer sa situation et sa performance afin de s’acquitter convenablement de sa mission.
Pour ce faire, l’association prévoit d’organiser le forum de l’action sociale « FOR’AS’’ en septembre à Casablanca dans le but de valoriser, reconnaître et consolider le travail des associations, un rôle soutenu par l’engagement des entreprises citoyennes afin de promouvoir l’action associative en général au Maroc.
M. El Kafi, qui a supervisé l’étude, a noté que ce sondage montre que la culture (16%) et l’éducation (13%) figurent en tête des questions bénéficiant d’un grand intérêt, suivies de la protection de l’enfance (12 %).
Selon M. El Kafi, il ressort de cette étude que 27 % des associations ont fait état d’une capacité moyenne à dénicher les compétences recherchées en matière d’animation, 47 % peinent à trouver les profils qualifiés pour l’organisation de leurs activités, tandis que 26 % ont affirmé avoir facilement découvert les ressources appropriées.
S’agissant des ressources en charge de la gestion du volet administratif des associations, l’étude a révélé que 40 % des associations ont déclaré ne pas disposer de personnel permanent alors 54 % ont indiqué qu’entre 1 et 9 % des employés sont permanents.
Selon cette même enquête, seulement 2% des associations contactées affirment que le nombre des bénéficiaires est supérieur à 5.000 par an, tandis que 76% des associations font état d’un budget annuel inférieur à 100.000 dirhams.
Compte tenu de ces contraintes et de toutes les initiatives visant à dynamiser l’action sociale en la dotant d’outils constitutionnels pour poursuivre sa mission d’encadrement, l’on est en droit de s’interroger sur les causes du dysfonctionnement qui engendre une situation difficile pour les associations en termes d’outils d’action disponibles, mais également de ressources humaines et de financement afin qu’elles puissent s’acquitter pleinement de leur mission conformément à la Constitution.